C'est avec une émotion certaine que je vous annonce la sortie de mon premier roman publié à compte d'auteur.
L’envie m’est venue, soudaine, il y a six mois. Elle se manifesta par quelques phrases, couchées sur le papier, qui ne racontaient rien de précis, juste une atmosphère au petit matin avant une journée de travail.
Et, ayant interprété cela comme un signal de départ, mon cerveau s’est mis en marche et m’a suggéré chaque jour ou presque, des idées. Une histoire a pris corps avec des personnages qui sont arrivés sans même m’avoir prévenu de leur arrivée !
Cinq mois de plaisir ont donné naissance à un roman. Comment le résumer ?
Ce n’est pas l’histoire d’un motard même si le personnage principal roule à moto (je vous laisse deviner laquelle
).
Ce n’est pas un récit de voyage même si Julien finit par prendre la route.
C’est l’histoire d’un homme à la vie ordinaire, voire terne. Un évènement extraordinaire va bouleverser l’ordre établi et Julien va emprunter un nouveau chemin rempli d’imprévus.
Voilà les premières lignes:
Il poussa les deux volets de bois. Le gauche émit un court grincement sur le gond. Une fois de plus, il pensa qu’il lui faudrait passer un peu d’huile dessus pour supprimer ce bruit, mais il savait qu’il n’en ferait rien. Peut-être que cette manifestation sonore du petit matin lui était devenue indispensable. Elle faisait partie du rituel quotidien, les deux oranges qu’il pressait avec application pendant que l’eau destinée à son thé bouillait, la radio allumée machinalement qui distillait les informations de la journée, la revue posée devant lui, sur la table, pendant qu’il déjeunait. Après, il y avait la toilette rapide dans la petite salle de bains, à l’étage supérieur.
Mais, ce matin, son esprit fit une pause. Il s’attarda d’abord sur l’atmosphère qui se dégageait du jardin. Il ne referma pas la fenêtre tout de suite; une brume légère avait envahi le quartier.
Hier, le soleil avait un goût d’été et, aujourd’hui, la fraîcheur prenait des allures de résistance. Il resta un long moment immobile, les fines gouttelettes du brouillard ambiant caressaient son visage. Il dirigea son regard vers la cour des voisins; il aperçut le chat roux qui avait élu domicile dans le quartier depuis plusieurs semaines. Il ne savait pas si c’était un chat errant où s’il avait des maîtres. Il aimait sa discrétion, la distance qu’il gardait avec sa maison. Régulièrement, il posait ses pattes de devant sur la poubelle qui servait de récupérateur d’eau, penchait délicatement sa tête et lapait calmement la pluie qui avait rempli le récipient.
Dans son champ de vision, une toile surgit comme par magie; en son centre, se tenait une araignée. Il avait toujours eu un élan de répulsion face à cet animal, une réaction ancrée en lui depuis sa tendre enfance. Il avait pourtant tenté de réprimer cette répugnance, mais c’était peine perdue.
Il avait beau savoir qu’elle n’était pas dangereuse pour l’homme, sauf dans des contrées éloignées, qu’elle était indispensable à l’équilibre naturel en se nourrissant d'insectes, son réflexe lorsqu’il en apercevait une était soit de s’en éloigner, soit de l’écraser.
Mais, à cet instant, il fut attiré par la beauté qui émanait de cette construction naturelle, quelques fils de soie sortis du corps de cette araignée aux pattes disproportionnées. La toile s’était parée de petites gouttes d’eau qui reflétaient la luminosité du jour naissant.
Au loin, un motard interrompit le silence ambiant en accélérant avec violence. Machinalement, il compta les vitesses: première, seconde, troisième, quatrième, cinquième, sixième et estima l’allure déraisonnable à laquelle la moto parcourait le boulevard. A cette heure-ci, il y avait très peu de circulation, mais il avait conscience de sa fragilité, sans la carapace d’acier des automobiles.
Les minutes s’égrenaient, mais il restait accoudé au rebord de la fenêtre, étrangement indifférent au temps qui s’écoulait, au retard qu’il prenait dans la préparation de sa journée de travail.
Sa rigueur coutumière, son souci d’être à l’heure ne semblaient pas devoir s’imposer aujourd’hui. Seul comptait la naissance du jour sous ses yeux. Les oiseaux ne virevoltaient pas encore dans les airs mais leurs piaillements avaient envahi le quartier. Il s’attarda sur le cerisier en fleurs et sur le pommier qu’il avait taillé quelques semaines plus tôt. L’extrémité des branches se garnissait de feuilles. Le printemps était de plus en plus présent. Etait-ce lui qui le détournait de sa routine quotidienne ?
Enfin, comme si la réalité se rappelait à lui, il se décida à refermer doucement la fenêtre puis il franchit le seuil de la cuisine. Il prépara son petit déjeuner avec une lenteur inhabituelle.
Il était devenu spectateur de ces gestes anodins, répétés chaque jour. Tout son être les recevait comme une nouveauté.
Il s’empara du vieux bol ébréché qu’il utilisait chaque matin. Il le fixa, se souvint qu’il avait appartenu à ses grands-parents. Quand ils étaient morts, à quelques mois d’intervalle, il avait récupéré quelques meubles et de la vaisselle. Il réalisait aujourd’hui qu’il avait fini par oublier son origine.
La vision de ce bol fatigué le projeta soudainement dans le passé. Il était dans la maison de pierre avec sa grand-mère aimante, elle lui préparait un bol de chocolat chaud, coupait deux tranches de pain qu’elle beurrait avec générosité, la cuisinière à bois réchauffait l’atmosphère de la vieille bâtisse construite en contrebas de l’imposante église. Assis devant la table ronde, il distinguait la silhouette de son grand-père en train de bêcher dans le jardin. La comtoise rythmait le temps avec les claquements réguliers de son balancier.
Depuis combien de temps n’était-il pas retourné dans ce village qui l’accueillait tous les ans, au cours de son enfance ?
Il tenta de reprendre le cours de sa journée qui n’avait pas encore véritablement débuté, mais son corps répondait de moins en moins aux injonctions de son cerveau. Il regarda la pendule accrochée au mur; cela faisait maintenant une heure qu’il était levé et il n’avait pas encore commencé son petit déjeuner.
Il se fit violence et s’attabla. Le bol de thé fumant resta un long moment devant lui avant qu’il ne daigne s’en emparer. Il absorba le liquide par petites gorgées, pensif. Cette journée ne ressemblait à aucune autre, elle semblait baignée d’incertitude.
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